lundi 1 novembre 2010

A propos de Nice

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Quand j'étais enfant, la ville de Nice avait pour moi un statut quasi mythique. Une personne de la famille avec un drôle d'accent y vivait et revenait une fois par an en Belgique pour me faire rêver avec des histoires de mer bleue, d'Italie proche et de promenade des Anglais. Avec toujours cette promesse d'accueil futur... Évidemment, je n'y suis jamais allé et peu à peu, la Côte d'Azur est devenue pour moi synonyme de parc à vacanciers, de miroir aux alouettes et donc de destination à éviter, peut-être à tort...
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A propos de Nice de Jean Vigo (1929) fait partie de ces films qui à la fin des années 1920 font de la Ville leur personnage principal (voir également Berlin, symphonie d'une grande ville de Walter Ruttman en 1927 ou L'homme à la caméra de Dziga Vertov en 1929). On y voit le casino, le bronzage sur la plage, les danses du carnaval... Surtout, ces images lumineuses et joyeuses sont troublées par l'apparition brusque de scènes violentes qui en disent long sur le regard du réalisateur : un homme a le visage brûlé alors qu'il bronzait, une femme se retrouve dévêtue dans sa chaise longue, un cireur de chaussures nettoie des pieds nus. C'est que Jean Vigo, dont le père était un célèbre anarchiste, souhaite montrer que sous le soleil, les inégalités sociales subsistent. Le film se fait dès lors œuvre de combat, mais comme l'a remarque J.-L. Comolli en accentuant "la fébrilité érotique de la ville, la griserie du ballet des corps et des passages - jusqu'à l'orgasme, (...) par une exacerbation, une ivresse du montage." (Voir et pouvoir, 2004, p. 549)
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L'intérêt pour le cinéma soviétique de Vigo explique en grande partie la forme prodigieuse du film. Plongées, contreplongées, ralentissements d'images, vues aériennes et science du montage participent à la création d'un véritable chef-d'œuvre visuel. Pour l'anecdote, Jean Vigo s'est fait aider par le directeur de la photographie Boris Kaufman, frère cadet de Dziga Vertov justement. Ayant dû endurer les affres de la censure, Jean Vigo n'a réalisé que quatre films et est mort de septicémie à 29 ans. On part à Nice ?
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