lundi 15 novembre 2010

Ciné-transe

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Ce dimanche 21 novembre, dès 20.00, une soirée consacrée à la "Ciné-transe" aura lieu au Cercle des Cinés (Rue des Wallons, 45 - Laveu, Liège) avec la projection de Divine Horsemen. The Living Gods of Haïti (1947-1981) de Maya Deren et Les Maîtres Fous (1954) de Jean Rouch. Musiques vaudou à l'apéro et au dessert.
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« Quand l’anthropologue arrive, les dieux s’en vont. » (Dicton haïtien)

«Pour moi, donc, la seule manière de filmer est de marcher avec la caméra, de la conduire là où elle est la plus efficace, et d’improviser pour elle un autre type de ballet où la caméra devient aussi vivante que les hommes qu’elle filme (…). Alors, au lieu d’utiliser le zoom, le cameraman réalisateur pénètre réellement dans son sujet, précède ou suit le danseur, le prêtre, l’artisan, il n’est plus lui-même mais un “œil mécanique” accompagné d’une “oreille électronique”. C’est cet état bizarre de transformation de la personne que j’ai appelé, par analogie avec les phénomènes de possession, la “ciné-transe”.»

Jean Rouch, La Caméra et les Hommes. Pour une anthropologie visuelle. Mouton, 1978.

Après quelques films d’inspiration surréaliste, la cinéaste américaine Maya Deren (1917-1961) concrétise son intérêt pour la danse et les rituels vaudous en séjournant à plusieurs reprises à Haïti en 1947, puis en 1954. La réalisatrice y collecte un matériel sonore, photographique et cinématographique incroyable, montrant que le projet ethnographique initial s’est vite transformé en obsession. L’investissement de Maya Deren est tel qu’elle sera initiée comme prêtresse vaudou. Le livre Divine Horsemen. The Living Gods of Haïti et cinq heures d’images filmées témoignent de son travail. En effet, la mort prématurée de Maya Deren l’empêche d’achever son film et c’est donc son mari Teiji Ito qui en présentera un montage en 1981. Le résultat montre un monde étrange, presque onirique, dans lequel la caméra aide à faire croire au phénomène de la possession. Mouvement, envol et lumière.

Inutile de présenter Jean Rouch (1917-2004) : cinéaste anthropologue, précurseur de la Nouvelle Vague, inventeur de la « ciné-transe », etc. Son film Les maîtres fous (1954), tourné au Niger, reste un choc par ses choix esthétiques et par ses implications morales, historiques et religieuses. Pour introduire cette œuvre unique, il est peut-être préférable de reprendre les propres mots de Jean Rouch : "Venus de la brousse aux villes de l'Afrique Noire, de jeunes hommes se heurtent à la civilisation mécanique. Ainsi naissent des conflits et des religions nouvelles. Ainsi s'est formée, vers 1927, la secte des Haouka. Ce film montre un épisode de la vie des Haouka de la ville d'Accra. Il a été tourné à la demande des prêtres, fiers de leur art Mountyeba et Moukayla. Aucune scène n'en est interdite ou secrète mais ouverte à ceux qui veulent bien jouer le jeu. Et ce jeu violent n'est que le reflet de notre civilisation".

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